Les élections au Landtag du Bade-Wurtemberg auront lieu ce 13 mars. Ce Land allemand compte plus de 10 millions d'habitants, deux millions de plus que la Suisse, dont il est l'un des partenaires commerciaux les plus importants. Bouleversé en mars 2011 par l'avènement au pouvoir d'une coalition verte-rouge, après un long règne du CDU qui avait duré des décennies, le Land est, à l'heure actuelle, le théâtre d'une bataille politique d'autant plus âpre. C'est dans cette situation tendue que nous y assistons à la déconfiture des grandes formations politiques, le CDU et le SPD.
Le CDU, à 39 pour-cent des suffrages en 2011 (à 44.2 % encore en 2006), est à 30 % dans les sondages actuels, le SPD, à 23,1 % en 2011, récolterait 13 % seulement, tandis qu'un nouveau parti, l'AfD (Alternative für Deutschland), que l'on peut qualifier d'extrême-droite (assez proche des positions du noyau dur de l'udc en Suisse), obtiendrait 11 %. Le FDP s'en sortirait avec 7 %, die Linke n'entrerait pas au Landtag, avec 4 % seulement (il lui en faudrait 5 %). Les vrais gagnants seraient les Verts, qui, selon les sondages, dépasseraient pour la première fois dans un Land allemand le CDU, avec 32 % des suffrages (24.2 % en 2011, 11,7 % en 2006, 7,7 % en 2001!).
L'analyse selon laquelle l'extraordinaire ascension des Verts serait due surtout à la personnalité type "Landesvater" du ministre-président vert Winfried Kretschmann fait quasiment l'unanimité. Dans son éditorial de samedi 5 mars, le journaliste Heribert Prantl, "Edelfeder" de la Süddeutsche Zeitung, parle d'un "bouleversement du paysage politique". Titre: "Kandidat hui, Parteien pfui". "Le système des élections allemand, écrit Prantl, est d'abord et en premier lieu orienté vers les partis, et non pas vers les personnes. Mais à l'heure de la dissolution des liens entre l'électorat et les partis, il semble bien que la personnalité du candidat de pointe acquiert une nouvelle importance." Selon cet auteur, il y a lieu de constater une volatilité augmentée de l'électorat qui toucherait l'Allemagne toute entière, avec en perspective une fragmentation du paysage politique où "de plus en plus souvent deux partis ne suffiront plus pour constituer un gouvernement".
On ne saurait comparer la situation en Allemagne avec ce qui se passe en Suisse, les rapports entre les partis politiques étant très différents, d'un pays à l'autre. En Allemagne, les partis gardent la distance, les uns par rapport aux autres, tandis qu'en Suisse, la politique du consensus et du partage généralisé du pouvoir à tous les niveaux (communes, cantons, confédération) a créé un système d'interdépendance dans lequel les partis n'ont plus la force suffisante pour se démarquer d'eux-mêmes et avec efficacité d'un groupement qui vire de plus en plus vers l'extrême-droite: l'udc. C'est pourquoi en Suisse, l'électorat est appelé à une riposte hors-partis par les impératifs mêmes de la citoyenneté, riposte qui s'est manifestée avec force ce 28 février dernier.
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